Préface
Les origines génoises de Dominique Parodi (1870-1955) [1] et sa connaissance de la langue italienne le conduisent en Italie où il est attaché, à la fin de l’année 1915, à l’Institut français de Florence [2], au sein de l’annexe milanaise créée pendant la guerre pour coordonner les activités de propagande de l’institution. Parodi œuvre durant un peu moins d’une année au service de la diplomatie latine de la France [3] avant d’être rendu à sa chaire de philosophie au lycée Condorcet à Paris au début du mois d’octobre 1916. Son action auprès de l’Institut français de Florence s’étend donc sur une période courte mais qui correspond à un moment d’intense mobilisation en faveur de l’alliance franco-italienne, quelques mois après l’entrée en guerre de l’Italie : au début de l’année 1916, Julien Luchaire, directeur de l’Institut, et l’historien Guglielmo Ferrero lancent en effet la « Revue des nations latines » dont la vocation est de manifester et de consolider l’unité latine face à l’impérialisme culturel allemand [Giladi 2013]. Durant la même période, un bulletin d’information quotidien est mis sur pied en étroite relation avec la « Revue » : les « Nouvelles internationales ». L’enjeu diplomatique majeur de la propagande française est alors la conversion de l’interventionnisme italien de 1915 en participation active à « l’alliance la plus étroite ». C’est l’élargissement des buts de guerre de l’Italie qui est visé : de la guerre nationale (« nostra guerra ») essentiellement dirigée contre l’Autriche à la logique du « front unique » contre la menace germanique, dans le cadre d’une guerre européenne [4]. L’action de Parodi offre un éclairage sur la mobilisation des intellectuels républicains français au service de la diplomatie culturelle [5] en direction de l’Italie. Le philosophe français, d’origine italienne par ses parents, mobilise au service de la propagande le thème de la latinité [6] en lui conférant une dimension philosophique, morale et politique.
Un philosophe mobilisé au service de la propagande française en Italie
Au moment où la guerre éclate, Parodi est un philosophe-professeur [7] très intégré à la communauté philosophique. Il collabore depuis deux décennies à différentes revues académiques [8]. Il appartient notamment au premier cercle des collaborateurs de la « Revue de métaphysique et de morale » [Soulié 2009], périodique qu’il dirigera à partir de 1937. Depuis 1905, il est membre de la Société française de philosophie dont il prendra la présidence en 1945. Son élection, en 1911, au Conseil supérieur de l’Instruction publique manifeste l’autorité intellectuelle et pédagogique acquise auprès de ses pairs. Selon une trajectoire classique, Parodi accédera en 1921 à la fonction d’Inspecteur général de l’Instruction Publique après avoir été nommé Inspecteur de l’Académie de Paris en 1917 [Caplat 1997, 420-423]. Il a été à la fois un acteur et un fin observateur du champ philosophique français : son tableau de La philosophie contemporaine en France, publié quelques mois après la guerre, propose en effet une cartographie précieuse des courants et des controverses philosophiques [Parodi, 1919]. En 1935, dans un essai intitulé En quête d’une philosophie positive, il présentera sa propre doctrine philosophique comme un « spiritualisme idéaliste » et « rationaliste » [Parodi, 1935].
Ardent républicain, mobilisé depuis l’Affaire Dreyfus dans le combat philosophique au service des idéaux démocratiques et contre la réaction cléricale, il passe au crible de la critique rationnelle le « positivisme » de droite des Brunetière, Bourget, Barrès et Maurras dans un recueil couronné par l’Académie des sciences morales et politiques [Parodi, 1909]. Philosophe moraliste [Parodi, 1910], défenseur de l’éducation morale laïque comme éducation à la liberté, il cherche à concilier l’exigence d’« autonomie morale » des individus et « l’unité morale » de la République.
A l’heure de la mobilisation générale, le 1er août 1914, Parodi n’a pas encore quarante cinq ans mais, déclaré inapte au combat par le conseil de révision, il n’est pas mobilisable [Soulié 2015]. Dans le clos des correspondances, Parodi s’avoue un peu « honteux » de continuer à philosopher quand d’autres, tel son collègue Emile Chartier (Alain), sont sur le front [Dagan 2005, 55]. Il éprouve cette « angoisse de l’inaction » qui fut, chez nombre d’intellectuels, l’un des ressorts de la mobilisation des esprits [Hanna, 1996] et peut-être l’une des explications du surinvestissement dans la participation à la propagande comme succédané « d’action » dans un moment où le service de la patrie ne semble faire sens que dans la geste militaire [9]. En juin 1915, Parodi est finalement versé dans les services auxiliaires de la réserve de l’armée territoriale. Pendant quelques mois, il occupe au vice-consulat de France à Vintimille une fonction ingrate de gratte-papier avant d’être mis à disposition ministère des Affaires étrangères grâce à l’intervention de ses amis philosophes. A Paris, Xavier Léon, « secrétaire de rédaction » de la « Revue de métaphysique et de morale », sollicite en effet René Berthelot qui fut le condisciple de Parodi à l’Ecole normale supérieure et dont le frère, Philippe, est le très influent directeur de cabinet du ministre. C’est en tant que chargé de mission par le quai d’Orsay que Parodi est ainsi attaché à l’Institut français de Florence. Dans une lettre de septembre 1916, Julien Luchaire définit les contours de la mission du philosophe : il sera envoyé à Milan au « service de la propagande » et son activité consistera en « un peu d’enseignement, des conférences, et surtout des enquêtes et dépouillements sur les questions économiques et sociales [10] ». Après quelques péripéties administratives, Parodi est officiellement adjoint à Luchaire à la fin du mois de novembre [11] et entre en fonction en janvier 1916. Les fonctions exercées par Parodi à Milan, parfois à Florence, et sa collaboration à la « Revue de nations latines » le mettent en relation avec les milieux intellectuels, journalistes et politiques italiens francophiles [12].
Les archives du philosophe, déposées au centre d’histoire de Sciences-po [13], apportent un éclairage sur son action en faveur de la « fraternité latine ». Il s’agit de lutter contre l’influence germanique et de faire évoluer les regards croisés de l’Italie sur la France et de la France sur l’Italie afin de favoriser leur rapprochement [14]. Dans le champ philosophique dont Parodi connaît parfaitement la géographie, la convergence latine face à l’Allemagne pangermaniste et militariste s’était amorcée avant la guerre : un « axe latin » franco-italien s’était dessiné à l’occasion des congrès internationaux de philosophie d’Heidelberg en 1908 et, surtout, de Bologne, en 1911 [15], convergence favorisée par les liens entre le réseau de la « Revue de métaphysique et de morale » (auquel Parodi appartient) et celui de la revue « Scientia » dont le directeur, Federigo Enriques, luttait, au sein de la communauté philosophique italienne, contre une minorité « hégélisante » davantage tournée vers l’Allemagne [Soulié 2014].
En exaltant l’amitié latine, Parodi prolonge cette convergence [16] mais il se montre également fidèle à la mémoire de son père, homme de lettres, italien de naissance et selon ses propres mots, « français volontaire ».
Idéalisme, patriotisme et latinité : une triple empreinte paternelle ?
A l’occasion d’un discours sur « l’accord franco-italien » prononcé durant sa mission en Italie, Parodi invoquait la figure paternelle pour faire valoir son « droit » à parler du « rapprochement italien » : ce droit « c’est mon père », peut-on lire dans ses notes [17]. Ce père, c’est Alexandre Parodi (1840-1901), qui, dans le contexte de la guerre de 1870, avait fait de la France une patrie d’élection.
Répondant, au printemps 1917, à une consultation lancée par la « Revue des nations latines » sur l’idée de « Fédération latine », Dominique Parodi ne manqua pas de citer son père parmi les Italiens qui incarnèrent la fraternité franco-italienne [Parodi 1917a, 567]. L’auteur de La philosophie contemporaine en France fera précéder son très patriotique avant-propos d’une dédicace à la mémoire du défunt « qui, toute sa vie, lutta durement pour le réveil de l’idéalisme en France, et qu’eût réjoui, avant la victoire des armes, le renouveau victorieux de la grande pensée idéaliste française, dont est tracée ici l’esquisse » [Parodi 1919]. L’idéalisme littéraire du père se prolongeait en somme dans l’idéalisme philosophique du fils avec des accents certes moins romantiques et plus sévèrement rationalistes.
Alexandre est le fils d’un négociant d’origine ligurienne [18], consul des Deux Siciles en Crète puis à Smyrne sous domination ottomane. C’est dans cette ville que le père de Dominique Parodi vécut sa jeunesse. Italien par filiation, il fut ainsi levantin et grec par adhésion. Dans l’atmosphère cosmopolite de ce « petit Paris d’Orient », il nourrit une passion pour la tragédie grecque et s’éprend de littérature française [Mortier 1877, 567, Larroumet 1901]. Ainsi, selon le chroniqueur Arnold Mortier, il s’était « fait une patrie en dehors de la sienne ». Le poète revendiqua en effet l’appartenance à « trois patries » : l’Italie, la Grèce et la France [Lavabre 2014, 257].
En 1861, Alexandre Parodi s’installe en Italie avant de se fixer à Paris en 1870 en quête d’une reconnaissance littéraire en français. C’est Rome vaincue, tragédie très « cornélienne », acceptée par le Théâtre Français en 1872 et représentée en septembre 1876, qui lui apporte son plus brillant succès, succès auquel Sarah Bernhard prend une part importante par sa prestation très remarquée [19]. L’inspiration de la pièce n’est pas sans relation avec le traumatisme de la guerre de 1870 : derrière Rome vaincue par Carthage, il faut voir la France vaincue par la Prusse. Le parallèle est assumé par le poète quelques années plus tard dans une vibrante invocation à la France :
J’ai dit Rome à ton peuple, au sortir des désastres,
Et, sous tes cieux éteints, à l’hostile univers,
J’ai montré sa vertu fécondant ses revers,
Et la nuit sur Carthage et le reflux des astres ! [20]
Cinq ans après ce moment de gloire littéraire, Alexandre Parodi se voit accorder par décret présidentiel le « titre de Français » [Parodi A. 1893, 315]. Il poursuivra son œuvre littéraire sans toutefois renouer avec le succès que lui avait apporté Rome vaincue. La synthèse entre théâtre classique et inspiration romantique qu’il tentait d’incarner ne séduisit pas durablement le public français. L’amour voué à la France n’aura pas suffi. Selon le critique Gustave Larroumet, la barrière de la langue ne pouvait être parfaitement franchie par un versificateur dont le français n’était pas la langue maternelle :
Nul n’aima la France plus que lui ; aucun de ceux qui, nés sur notre sol, y plongent par toutes les racines de leur être n’eut une piété plus filiale envers la mère commune. Mais si notre cœur peut en quelque sorte se créer lui-même, il n’en est pas de même pour notre cerveau et notre langue [Larroumet 1901].
La dimension « patriotique » de l’œuvre de Parodi est souvent soulignée par les commentateurs. Dans un essai sur Le théâtre en France, publié en 1885, Alexandre Parodi avait appelé de ses vœux la revitalisation du drame à partir de sujets empruntés à l’histoire de France plutôt qu’à l’Antiquité romaine ou à l’épopée espagnole. Il s’y était essayé l’année précédente, dans La jeunesse de François Ier, malheureusement refusée par le Théâtre-Français. En travaillant à la gloire des lettres françaises, il entendait faire œuvre de régénération nationale :
Pardonne au long amour, au dur labeur, ô France,
L’humilité de l’œuvre et l’audace des vœux :
En venant me mêler, étincelle, à tes feux,
J’ai fait de ta grandeur ma plus sûre espérance ;
J’ai prouvé que ton âme a partout rayonné,
Et qu’un fils et peu naître aux confins de la terre :
De l’Asie accouru, j’ai, Français volontaire,
Baisé ton front sanglant d’outrages couronné [Parodi 1893, VII]
Pour le poète qui, selon le mot de Larroumet, avait demandé « l’adoption à la France malheureuse et travaillé à son relèvement » [ 1901], l’entrée, en 1882, de l’Italie dans la Triplice aux côtés de l’Allemagne fut un scandale. Dans une note de 1888, introduisant l’édition française de l’essai du démocrate italien Romolo Federici, Les lois du progrès, il dénonçait ainsi l’alliance « avec la race hostile, qui l’a de tout temps humilié et opprimée, contre la race amie, qui l’a secourue et relevée au prix de son sang » [Parodi. A 1888, V]. Il se souvenait qu’en 1870 Federici avait appelé la démocratie italienne à soutenir la France contre la Prusse de Bismarck en opposant la « vertu latine » à la « furie teutonique » [VI].
L’élan patriotique et l’exaltation de l’identité latine seront sans doute plus étroitement corsetés dans la pensée rationaliste de Dominique Parodi et sa défense de l’individualisme démocratique. L’Affaire Dreyfus a peut-être même ouvert une ligne de clivage familial : en 1899, le père donne en effet sa signature à la Ligue de la Patrie Française qui rassemble les personnalités antidreyfusardes du monde littéraire [Lemaître 1900, 32] alors que le fils contribue à la critique rationnelle dreyfusiste [Soulié 2006]. Mais, dans le contexte de l’Union sacrée, la mémoire du père pouvait être mobilisée sans dissonance dans le cadre de la mission du fils en Italie au service de l’alliance franco-italienne.
Les fondements culturels et moraux de l’alliance : l’idéal latin de la liberté et du droit face à la mystique germanique de la force
Le plan d’un cours figurant dans les archives Parodi laisse penser que le philosophe a assuré en Italie un enseignement sur « la littérature dans son rapport avec le mouvement des idées en France au XIXe siècle [21] », mobilisant une solide culture normalienne et l’héritage littéraire paternel [22]. Parodi prononça également des conférences plus immédiatement orientées par les besoins de la propagande : une liste de sujets, apparemment établie par lui, constitue sans doute un programme sans que l’on puisse préciser dans quelle mesure celui-ci a été mené à bien. Il s’agit de dégager les fondements culturels de l’alliance franco-italienne face à l’altérité culturelle germanique [23] : « la conception allemande de la guerre », « le principe des nationalités : interprétation teutonne et interprétation française », « le génie latin et le génie germanique », « civilisation et culture », « l’amour de la gloire chez les Latins et la “volonté de puissance” chez les Allemands », ou encore : « deux conceptions de la paix idéale : “l’organisation” du monde par l’Allemagne ; le statut juridique des nations ». D’autres sujets invitent à explorer les relations intimes entre la culture italienne et la culture française : « le génie italien et le génie français », « la conception romaine et française du droit », « l’influence de l’Italie dans la littérature française », « l’Italie chez les romantiques français : Lamartine, Hugo, Musset », « Victor Hugo et Giosue Carducci », « Victor Hugo et Garibaldi », « l’Italie dans le théâtre d’Alfred Musset », « un français italianisé : Stendhal » ou encore, « la France à l’Ecole de l’Italie : la Renaissance » [24]. Ce programme souligne particulièrement l’influence italienne sur les lettres et les arts français. Parodi semble en effet avoir craint un effet contre-productif de la propagande française en Italie lorsqu’elle tendait à faire de la France le chef de fil du monde latin au risque de froisser l’orgueil italien. Cette inquiétude est manifeste dans un rapport sur l’action de l’Institut français de Florence remis au ministère des Affaires étrangères par Parodi au terme de sa mission en Italie [Renard 2001, 326].
Les quelques notes de conférences conservées dans les archives Parodi sont tendues vers le double objectif de justifier la guerre d’un point de vue français et de rendre manifeste une communauté latine d’idéal réunissant Français et Italiens. Parodi entend premièrement dégager le « sens moral » de la guerre menée par la France [25] : « la morale c’est le respect du droit d’abord ; et c’est l’effort de bonté et de sacrifice ensuite ». La première proposition reprend le thème « la guerre du droit », récurrent sous la plume des intellectuels mobilisés [26]. Il s’agit tout d’abord de montrer que la France « n’a pas voulu la guerre » et que sa politique extérieure a manifesté une volonté persévérante de maintenir la paix jusqu’au moment ultime [27]. Parodi entend ensuite justifier la guerre présente comme une guerre des « puissances libérales » contre les « puissances absolutistes », une guerre des « puissances pacifistes » contre le militarisme, une guerre des défenseurs des traités contre les « partisans de la thèse que nécessité fait loi » [28]. Dans cette guerre qu’il faut mener jusqu’au bout pour faire triompher le droit, la France est donc restée, selon Parodi, « fidèle à ses principes et à son idéal ». Ce droit, dont la France se fait le héraut, c’est à la fois le droit des nationalités (ou « principe des nationalités »), le droit personnel au sens de l’individualisme démocratique (« le principe de liberté intérieure ») mais également le droit des Etats (« le principe de l’organisation par la paix entre égaux » opposé à la prétention allemande « d’organiser » le monde sous sa férule). Le second enseignement moral de la guerre est la manifestation d’unanimisme de « la nation armée », l’esprit de sacrifice des Français. Parodi insiste sur la « hauteur morale où cette guerre a mis les plus humbles », évoquant « l’atmosphère de sacrifice souriante et grave » qui caractérise ce qu’il qualifie en d’autres occasions de « guerre démocratique » [29], c’est à dire une guerre de masse qui repose sur le consentement de tous et la valeur de la mobilisation collective bien davantage que sur le génie individuel et la capacité de décision des stratèges. Le discours fait volontairement silence sur l’inquiétante ambivalence de l’expérience morale de la guerre que Parodi pointe pourtant à la même époque, avec prudence mais sans doute davantage d’exigence critique, dans la « Revue de métaphysique et de morale » [30].
Le point d’orgue de l’action de Parodi au service de la diplomatie culturelle française fut sans doute le discours qu’il prononça à Milan, au théâtre Carcano, le 14 juillet 1916, lors d’une célébration organisée par la Lega Franca-Italiana [31] à l’occasion de la fête nationale française. Dans son allocution, Parodi fait du 14 juillet 1789 et du 14 juillet 1790 deux dates qui « expriment le commencement de l’apostolat moderne de la France libérale et démocratique, et l’union de tous les Français en une unanimité active et victorieuse ». Il expose ce que sont, selon lui, les « trois raisons d’orgueil » pour la France en cette guerre : son rôle militaire, la signification morale qu’elle lui donne et sa fonction « de trait d’union matériel et moral entre les alliés » [32]. Le lendemain, le « Corriere della Sera » et « Il Secolo » mentionneront le rapprochement établi par Parodi, à la fin de son discours, entre les deux drapeaux tricolores : le vert italien symbolisant l’avenir et le bleu français l’idéalisme.
C’est en effet sur la base d’une commune conception « idéaliste » de la guerre, que Parodi œuvre au rapprochement de la France et de l’Italie. Ainsi, lors d’une conférence sur « l’accord franco-italien », devant un auditoire semble-t-il féminin, Parodi, qui supplée ce jour là Luchaire, présente la guerre comme une guerre pour « la liberté et le droit des peuples », une « guerre pour la paix ». Dans l’expérience de la guerre « se retrouve et se renouvelle l’unité de la race latine » qui solidarise Français et Italiens dont Parodi souligne la triple parenté : ethnique (« la fusion intime de deux peuples tout le long de la frontière »), linguistique et historique, littéraire enfin (fruit des « échanges intellectuels constants » entre les deux peuples). La signification culturelle et morale de la guerre tient dans l’opposition entre l’esprit germanique fondé sur des « principes d’oppression et d’autorité pures » défendant « l’organisation dans la servitude » et l’ « idéal latin » défini par Parodi comme un idéal non pas mystique mais juridique (en référence notamment au juridisme de Salandra), un idéal d’humanité qui défend « l’harmonie dans et par la liberté ». Parodi clôt son allocution par une éloquente citation extraite de l’ode de Giosue Carducci A Victor Hugo [33], traduite par son père, citation qui exalte la latinité :
La monde écoute : chante, ô vieillard, voix divine
Son hymne séculaire à la race latine :
L’hymne de la justice et de la liberté [34].
Carducci et Hugo incarnent ainsi cette communauté intime entre France et Italie qui prend pleinement sens dans le moment de la guerre. La dimension culturelle et morale de l’alliance franco-italienne apparaît dans de nombreux textes de Parodi : dans les pages de la « Revue des nations latines » notamment, où Parodi souligne les « affinités naturelles » entre les peuples défenseurs de la liberté [Parodi 1916d, 601] et fait de la « générosité humaine », du « souci juridique » comme « les fruits naturels de la latinité » [Parodi 1916g, 436]. Dans sa réponse à l’enquête lancée par la « Revue » sur l’idée d’une « fédération latine », Parodi évoque à nouveau, au printemps 1917, une « affinité de races » [Parodi 1917a, 567] [35]. Et, dans une brochure de propagande sur l’alliance italienne publiée en France en 1918, le philosophe souligne « une profonde analogie de culture » entre Italie et France, une commune « atmosphère morale » [Parodi 1918, 37]. L’usage du terme polysémique de « race » ne doit pas tromper sur le sens que Parodi attribue à cette communauté. Le dernier article publié par le philosophe dans la « Revue des nations latines », en septembre 1917, lèvera de ce point de vue toute ambigüité : l’un des grands enseignements de la guerre est que les « idées et les philosophies » pèsent autant que les « particularités ethniques ». Ainsi, le conflit n’apporte « aucune confirmation à la théorie des races ». Pour le rationaliste idéaliste, le soubassement de la communauté de référence ne saurait être biologique : la guerre n’est pas le « choc confus de types organiques » [Parodi 1917b, 116] [36]. Cette conception idéaliste de la latinité comme communauté morale se distingue des conceptions « positivistes » de la droite conservatrice et réactionnaire qui exalte également, à sa manière, l’union des deux « sœurs latines » [37].
L’analyse de l’actualité politique au service de la propagande: la collaboration de Parodi à la « Revue des nations latines » et aux « Nouvelles internationales »
Dans le cadre de l’Institut de Milan, Parodi participe également à un lourd travail de documentation et d’analyse de l’actualité politique en France et en Italie, dans le cadre des « Nouvelles internationales »/« Notizie internationali » et de la « Revue des nations latines ». Cette analyse réflexive, mais orientée par les besoins de la propagande, répond à deux objectifs : contribuer au réveil moral des nations latines considérées dans leur individualité (à commencer par la France) et consolider leur alliance.
Un feuillet manuscrit intitulé « les problèmes de la guerre » dessine un programme de réflexion sur la manière dont la guerre transforme les conceptions politiques, économiques et sociales [38]. Ce sont en premier lieu les effets de la guerre sur l’idée et la pratique démocratiques qu’il faut penser [39]. Le programme aborde également la place de la religion dans la guerre (« guerre et sentiment religieux », « le cléricalisme et la guerre »), les effets du conflit sur l’organisation économique (à travers les questions du protectionnisme et de la réforme du régime fiscal), mais également sur les doctrines socialistes, sur les conceptions de l’éducation ou encore sur les questions démographiques. D’autres sujets portent sur les modalités d’organisation de la paix future : « la question des annexions et le droit des peuples », « la question de l’arbitrage obligatoire et de la limitation des armements » ou encore celle du « cosmopolitisme et [du] protectionnisme intellectuels » qui pose le problème de l’exclusion de l’Allemagne des relations culturelles internationales.
Ce programme a été en partie mis en œuvre dans la « chronique » de la « vie politique » française que Parodi assure entre mai et octobre 1916 dans la « Revue des nations latines ». L’auteur y défend la République en réaction au « réquisitoire des théoriciens de droite [40] » et à « l’impuissance qu’on lui attribuait à maintenir ou à permettre seulement l’unité d’action, l’esprit de décision, la volonté unanime que suppose la guerre » [Parodi 1916d, 595] [41]. Selon Parodi, la démocratie parlementaire a su démontrer sa capacité à faire la guerre. Le philosophe défend ainsi le bien fondé de la réunion de la chambre des députés en comité secret afin d’assurer la continuité de la vie démocratique en situation de guerre et il souligne les vertus du contrôle parlementaire sur les administrations militaires qui doit permettre de lutter contre les dérives bureaucratiques. « L’unanimité nationale » a rendu inutile la dictature et montré que la démocratie « pouvait être encore un organisme sain et vigoureux » : le « virus anarchique » n’a pas pénétré la République [596] qui, au contraire, a démontré sa supériorité « morale » dans l’état de guerre :
[…] les jeunes hommes formés par la « laïque » et « l’école sans Dieu » se sont montrés les plus capables d’énergie morale que la France ait connus ; la démocratie anarchique et divisée contre elle-même, a donné le spectacle de l’union nationale la plus étroite, la plus héroïque, la plus sublime, union qui se renouvelle et se resserre chaque fois qu’il en est besoin [Parodi 1916d, 602].
Le modèle défendu par les adversaires de la République, celui de la « monarchie traditionnelle et réaliste, hiérarchisée et militaire » est en réalité celui de l’ennemi germanique. En somme, un maurrassisme cohérent devrait être germanophile. De ce point de vue, Benedetto Croce [42], en Italie, apparaît « conséquent lorsque, s’inspirant des mêmes doctrines politiques, à peu près, que Maurras, il se déclare germanophile parce que conservateur » [Parodi 1916d, 601]. Parodi entend ainsi transformer le regard très critique porté avant guerre par certains nationalistes italiens sur une France décadente affaiblie par une démocratie synonyme de division nationale [43]. C’est en même temps inviter les lecteurs italiens à se détourner des solutions préconisées par une droite autoritaire.
La démocratie doit sortir vainqueur de l’expérience de la guerre de masse. L’enjeu est donc transnational. Parodi célèbre ainsi l’alliance des peuples démocrates contre l’autoritarisme et le militarisme germanique :
[…] nous aurons vu enfin, unis dans un même camp comme par des affinités naturelles, tous les peuples où vivent les idées de liberté, d’individualisme et de démocratie, qu’ils aient d’ailleurs à leur tête, ce qui n’est que secondaire, un roi constitutionnel ou un président de la République » [601].
Le succès de la « quadruple entente », incluant l’Italie, marquera donc un progrès remarquable des « idées démocratiques » en Europe.
Parodi consacre, d’autre part, de nombreuses pages de sa chronique aux effets de la guerre sur l’attitude et la doctrine des socialistes [44]. Il enregistre avec satisfaction l’adhésion de la majorité des socialistes français à « l’œuvre » de défense nationale contre la minorité favorable à la « paix immédiate ». Inversement, il dénonce l’attitude de « neutralisme entêté et intraitable » [Parodi 1916g, 426] des socialistes italiens qui n’ont pas été confrontés dès l’été 1914, contrairement à leurs homologues français, à la question de la défense du sol. Selon le philosophe, la guerre doit libérer le socialisme des perversions introduites par le dogmatisme marxiste et la social-démocratie allemande et favoriser l’affirmation d’un socialisme démocratique, soucieux de justice et de liberté, reconnaissant la réalité des collectivités nationales et la nécessité du patriotisme. Ce socialisme « idéaliste » [Parodi 1916f, 281] renouerait avec sa filiation française individualiste et libérale héritée du XVIIIeme siècle et de la Révolution Française, se fermerait aux tentations autoritaires du socialisme allemand et s’émanciperait des dogmes de la lutte des classes et du matérialisme historique fragilisés voire « démentis » par l’expérience de la guerre.
Enfin, la défense de la latinité contre le germanisme impose à la France de poursuivre son entreprise de redressement national en combattant les pathologies indissociablement morales et sociales qui la menacent, particulièrement la faible natalité française qui fait dire à Parodi qu’il n’y a « pas de patriotisme sincère et éclairé qui ne doive mettre le problème de la population en tête de son programme national » [Parodi 1916c, 435]. La réponse à ce problème passe par des mesures vigoureuses contre la « fréquence des manœuvres abortives » [433] et, symétriquement, favorables aux familles nombreuses. L’autre grande menace sociale, qui appelle en France une mobilisation politique résolue, est l’alcoolisme [Parodi 1916e]. Parodi aborde enfin prudemment la question du « féminisme [45] » [Parodi 1916h] dont la guerre accélère les progrès, sur le plan économique notamment : il faut, selon lui, chercher la voie d’une conciliation entre la nécessaire évolution des droits des femmes et la prise en compte du péril démographique. En effet, en risquant de l’écartant du foyer, le travail pourrait détourner la femme de « sa destinée naturelle » [583h].
Après son retour à Paris en septembre 1916, Parodi met un terme à sa chronique politique dans la « Revue des nations latines ». Il publiera néanmoins trois nouveaux textes entre l’automne 1916 et l’automne 1918 dont sa réponse à la consultation lancée par la « Revue » sur l’idée d’une « fédération latine ». Parodi y formule le vœu d’une meilleure coordination des politiques française et italienne et s’interroge sur la possibilité « de concevoir des organes fédéraux pour concilier les intérêts économiques, pour accorder même les préparatifs militaires ou l’attitude diplomatique ». Il évoque notamment la perspective d’une « union douanière » qui serait la « conséquence et la garantie » d’une alliance politique [Parodi 1917a, 567]. Son texte s’achève sur une profession de foi « idéaliste » conforme à son rationalisme soucieux de recueillir l’enseignement de la réalité :
ayons confiance en notre idéal de justice internationale et d’amitié latine, non pour croire qu’elles triompheront toutes seules, encore moins qu’elles soient sans action dans la mêlée confuse des intérêts déchainés : cette guerre, où le réalisme déterministe et mystique de la force sera vaincu, doit nous enseigner que […] l’homme peut faire passer dans les faits quelque chose de ses fins les plus idéales, à la condition que cet idéal même surgisse de la réalité concrète et de l’histoire [568].
Dans le cadre de l’annexe milanaise de l’Institut français de Florence dont l’action se développe en relation étroite avec le ministère des Affaires étrangères [46] et le Comité parlementaire d’action à l’étranger [47], Parodi participe au dépouillement de la presse et la rédaction de notes périodiques sur l’opinion italienne, notes dont certaines sont destinées exclusivement aux autorités politiques (sous la forme de notes confidentielles) et d’autres aux journaux français. De façon symétrique, les bureaux de l’Institut diffusent auprès des faiseurs d’opinion italiens (hommes politiques, publicistes, professeurs) notes et extraits d’articles en provenance de la presse française. Ce fastidieux travail d’information et de documentation vise à améliorer la connaissance mutuelle des opinions française et italienne et à les orienter dans le sens d’un renforcement de l’alliance. Parodi participe ainsi activement au lancement des « Nouvelles internationales » (« Notizie internazionali ») au printemps 1916 dans le cadre de la Section information. Ces « Nouvelles internationales » forment un bulletin sur l’actualité italienne et internationale alimentant la presse française (notamment la presse régionale) en communiqués quotidiens, bulletin dont les « Notizie internazionali » forment le pendant italien.
Les notes rédigées par Parodi au printemps 1916 peu après la visite d’Aristide Briand en Italie (« l’opinion publique en Italie » et « la situation politique en Italie : les partis interventistes ») enregistrent le progrès des idées de « fraternité latine » et d’alliance. L’auteur voit se dessiner dans les milieux interventionnistes un mouvement en faveur de « la plus grande guerre ». Dans les journaux dépouillés, la représentation d’une « guerre spéciale austro-italienne distincte du grand conflit européen » tend en effet à s’effacer : malgré les réticences parlementaires, Parodi croit pouvoir affirmer qu’une « sorte de nécessité naturelle et un grand souffle d’idéalisme emporte l’Italie vers ses destinées » [48]. Le développement des « Nouvelles internationales » s’inscrit dans le contexte de la bataille de Verdun et dans celui de la préparation de la conférence économique interalliée de Paris, annoncée à la fin du mois de mars 1916 et qui doit se tenir en juin. Parodi consacre plusieurs notes à cette actualité [49]. Le 5 avril, il écrit qu’en Italie « on semble avoir de plus en plus le sentiment qu’un choix définitif a été fait, qui engage le plus lointain avenir, et que toute la conduite de la péninsule, au point de vue politique comme au point de vue économique, devra s’orienter dans des directions nouvelles. De l’entente, les esprits semblent entrainés à l’idée de l’Alliance [50] ».
Durant l’été 1916, Luchaire souhaite intensifier l’action de l’Institut alors que se dessine en France une campagne de presse d’envergure en faveur de « l’alliance la plus étroite ». Il mobilise à cette fin ses collaborateurs, particulièrement Dominique Parodi qui se trouve en première ligne :
Cette campagne a été décidée, lors de mon dernier séjour à Paris avec quelques hommes politiques et journalistes, notamment Pichon [51], Tardieu [52], Milhaud [53], etc. Il nous incombe maintenant de ne plus perdre une minute et 1° de fournir à ces publicistes et de publier nous mêmes par nos moyens en France tout ce qui peut servir à nourrir et à renforcer cette campagne ! 2° de veiller ce qu’elle ait en Italie le plus large écho [54].
La besogne harassante et parfois ingrate [55] que représente ce travail de documentation par les collaborateurs de Luchaire a sans doute été sans commune mesure avec ses effets réels. De retour à Paris, Parodi manifestera dans un rapport sur l’activité de l’Institut remis au Ministère des Affaires étrangères, un relatif scepticisme quant à l’utilité, après l’entrée en guerre de l’Italie, d’une telle débauche d’énergie au service de la propagande [Renard 2001, 324]. Parodi est sans doute conscient d’avoir participé à une forme d’emballement intellectuel au service de l’effort de guerre. La volonté de servir la patrie l’emporte décidément sur les exigences de l’esprit critique mais, de retour en France, Parodi n’en continuera pas moins d’œuvrer au service de la propagande, notamment lors de tournées de conférences patriotiques [Soulié 2015]. La frontière est incertaine entre la sincérité intellectuelle et le discours convenu au service de la propagande. A l’évidence, il y a bien chez Parodi comme chez beaucoup d’intellectuels, une forme de dédoublement du discours, un conflit intime entre sa visée performative, immédiatement politique et les droits de la critique rationnelle [56]. Toujours est-il que sa définition de la latinité, opposée à l’altérité germanique, est conforme à ses convictions démocratiques et républicaines. C’est une définition philosophique et politique opposée à toute idée d’un déterminisme de la race. L’unité latine rassemble les peuples qui se réclament de la défense de « l’idéal » contre le mysticisme de la force brutale et de l’individualisme démocratique contre l’autoritarisme. C’est d’une communauté d’idéal fondée en raison que l’alliance doit tirer sa force :
… c’est donc bien la valeur rationnelle et morale de ces principes qui, ayant permis l’Entente de se nouer, est à la source de sa formidable puissance militaire, politique, économique, qu’on peut croire invincible ; et par suite on peut penser que ces principes encore ont pour eux l’avenir, et triompheront avec les peuples mêmes qui s’en réclament et les représentent [Parodi 1917b, 117].
Le thème de l’alliance franco-italienne la plus étroite prend pleinement sens dans le cadre d’un conflit européen et plus largement mondial dont l’enjeu est de faire barrage à la volonté germanique d’imposer une domination universelle. C’est le sort de l’humanité qui se joue dans cette « guerre à outrance [57] » dont l’issue décidera de l’organisation du monde. La « paix immédiate » réclamée par certains pacifistes socialistes ne serait en réalité qu’une trêve, une « paix boiteuse et prématurée » [Parodi 1916g, 433]. La « guerre démocratique, libérale » [435g], la guerre pour la paix, implique l’écrasement total de l’impérialisme et du militarisme germaniques qui permettra la réorganisation du monde sur les principes, portés par les nations latines, de liberté, de justice, de droit et d’égalité entre les peuples.
Liste des références
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Note
1. Parodi est né à Gênes de l’union d’Alexandre Parodi et de Vittoria d’Aste (fille l’auteur dramatique Hippolyte d’Aste).
2. Sur l’Institut français de Florence, voir Renard 2001.
3. . Par « diplomatie latine », il faut entendre ici l’action en faveur d’un rapprochement de la France et de l’Italie contre la menace germanique. Cette diplomatie latine a notamment été incarnée, avant la Première Guerre mondiale, par Gabriel Hanotaux (La paix latine, Paris, Combet, 1903) et s’est traduite par une politique méditerranéenne dont l’ambassadeur de France à Rome, Camille Barrère, a été le grand artisan. La neutralité italienne en 1914, puis l’intervention de l’Italie dans la guerre, en 1915, sont en partie les fruits de cette politique : Ferragu 1999, Le Moal 2008. Dans le cadre de l’Institut français de Florence et de son annexe milanaise, cette diplomatie latine mobilise le thème de la commune appartenance culturelle de la France et de l’Italie à la « latinité ».
4. L’enjeu est formulé en ces termes par Parodi dans ses notes de 1916 et dans une brochure de propagande publiée en France en 1918 sur « l’alliance italienne » : Parodi 1918, 23.
5. La diplomatie culturelle correspond aux « échanges culturels organisés » par des institutions qu’elles soient publiques ou privées. Pour un point historiographique sur la notion de diplomatie culturelle, voir Dulphy, Matard-Bonucci, Ory 2010, introduction, 27-30, Chaubet, Martin 2011, 117-142, Franck 2012, chapitre 16, 371-386. La notion de « diplomatie culturelle » invite à réfléchir sur la manière dont les « dispositifs d’action culturelle » contribuent à la « diplomatie publique ». Comme l’écrivent Chaubet et Martin : en France, « le recours à la culture s’est souvent imposé comme l’une des plus intéressantes ressources qui puissent être mobilisées par un pays et son appareil diplomatique » : 2011, p. 117.
6. Le thème de la « latinité », et plus précisément de la « panlatinité », connaît un développement important au XIXe et au début du XXe siècle. Dans le cadre européen, les nations latines sont celles qui sont les plus liées à l’héritage de l’Empire romain (Italie, France, Espagne, Roumanie, Portugal). La dimension antigermanique du thème de la latinité s’affirme à partir de la guerre de 1870. Sur l’idée latine, notamment du point de vue français, voir notamment Traimond 2004, Sarah Al-Matary 2011, Poupault 2012, Fraixe, Poupault, 2014.
7. Normalien, agrégé de philosophie en 1892, il prépare ses élèves du lycée Condorcet au concours de l’Ecole normale supérieure.
8. La « Revue de métaphysique et de morale », « l’Année sociologique » de Durkheim (il fait partie de l’équipe qui participe au lancement de la publication), la « Revue philosophique de la France et de l’étranger » ou encore la « Revue du mois ».
9. La mobilisation patriotique des intellectuels français durant la Première Guerre mondiale et leur participation à une « culture de guerre » ont fait l’objet de nombreux travaux que nous ne pouvons citer dans les limites de cet article. Parmi les études fondatrices, outre Hanna 1996, voir Prochasson, Rasmussen 1996, Becker, Audoin-Rouzeau 2000, 159-254, Dmitriev 2002.
10. Lettre de Luchaire à Parodi du 23 septembre 2015, Fonds Parodi, en cours d’inventaire, Archives d’histoire contemporaine, Centre d’histoire de Sciences-Po, carton 18 (PAD 18). Dans la suite de l’article, les références au fonds sont désignées sous la forme abrégée suivante : Sciences-po PAD.
11. Lettre de Parodi à Luchaire du 5 décembre 2015, Sciences-Po, PAD 18.
12. On trouve dans le fonds Parodi la trace de contacts directs avec Gaetano Salvemini, Giuseppe Prezzolini (Parodi sert d’intermédiaire entre l’écrivain et la « Revue de métaphysique et de morale ») ou encore Luigi Luzzatti.
13. Essentiellement les cartons PAD 18 et PAD 19, selon le classement provisoire établi par Luigi Vitello sous la direction de Dominique Parcollet, en collaboration avec Stéphan Soulié.
14. Sur ces regards croisés et le contexte italien de réception de la propagande française en Italie, voir notamment Grange D. J. [1993], Decleva E. [1993], Milza P. [1993] et Bracco B. [1998].
15. Italiens et Français convergeaient notamment dans le souci de rapprocher philosophie et science.
16. Parodi est en relation avec Eugenio Rignano, directeur de « Scientia » comme en témoigne une carte du 26 janvier 1916 dans laquelle le philosophe italien invite le français à lui rendre visite (Sciences-Po, PAD 19).
17. Feuillet non daté, Sciences-Po, PAD 18.
18. Domenico Parodi, né à Loano en 1799.
19. Dominique Parodi parviendra à faire rejouer la pièce en 1902 quelques mois après la mort de son père.
20. Ces vers figurent en exergue du premier volume de ses œuvres théâtrales : Parodi 1893, VI.
21. Le plan du cours est le suivant : I. Généralités. La littérature classique. II. La pensée romantique. III. La formation de la sensibilité romantique. IV. Le romantisme et la restauration. V. Le romantisme et la restauration (suite). VI. L’évolution du romantisme sous la Monarchie de Juillet. VII. Romantisme et démocratie. VIII. La réaction anti-romantique. IX. La littérature du 2° Empire. X. La littérature après 1870. XII. La littérature après 1870 (suite), Sciences-Po, PAD 18.
22. L’origine paternelle de la culture littéraire de Parodi a été soulignée par l’un de ses condisciples à l’ENS, Célestin Bouglé : « L’âme de notre jeune philosophe est donc de bonne heure imprégnée d’une poésie à la fois cornélienne et romantique. Des vers nombreux, non seulement de son père, mais des précurseurs de son père, chantent toute sa vie dans sa mémoire. Ses camarades de « turne » à l’Ecole Normale Supérieure se souviennent que, toutes lumières éteintes, il déclamait volontiers tout un Ruy Blas… » [Bouglé 1937, 89].
23. Sur les représentations croisées de l’ennemi en France et en Allemagne depuis 1870, voir Jeismann 1997.
24. Sciences-Po, PAD 18.
25. « Le sens moral de la guerre », note manuscrites, Sciences-Po PAD 18.
26. Ce thème est désormais bien connu. Outre les travaux mentionnés plus haut sur la mobilisation des intellectuels, voir le numéro de « Mil neuf cent. Revue d’histoire intellectuelle », 23, 2005/1 consacré à la « guerre du droit » (Thiers 2005-1), notamment Dagan 2005, Thiers 2005-2 pour l’intervention des philosophes. Plus généralement, sur la mobilisation intellectuelle des philosophes pendant la guerre, voir Soulez [1988], Losurdo [1994], Tiercelin [2015]. Le cas de Bergson, le plus étudié, a donné lieu à de nombreux travaux de philosophes et d’historiens. Citons : Soulez 1988-2, Soulez 1989, Trotignon, Chapoutot 2008, Zanfi 2013, 224-252 ainsi que le récent numéro des « Annales bergsoniennes » : François A., Kisukidi Y. Riquier C. Zanfi C. (eds.) 2014.
27. Parodi en veut pour preuve la modération française sur la question de l’Alsace-Lorraine, le traitement de la crise d’Agadir, son effort de médiation dans la crise austro-russe ou encore sa proposition, en juillet 1914, d’une conférence des puissances désintéressées.
28. C’est le thème fameux du « chiffon de papier » : traités et conventions ont été considérés par les Allemands comme de simples chiffons de papier que le droit du plus fort et une forme de providentialisme mystique autorisaient à froisser.
29. L’expression « guerre démocratique » apparaît notamment dans les pages de la Revue des nations latines : Parodi 1916d, 597 et 1916f, 435.
30. Si la guerre a révélé la valeur morale des combattants dans leur acceptation du sacrifice en vertu d’idéaux élevés, elle porte également en elle la menace d’un effondrement général de la morale que provoquerait l’acceptation généralisée de la violence et la militarisation des esprits. Les signes d’un renouveau de la foi religieuse, en situation de guerre, font d’autre part craindre au défenseur de la laïcité un retour du cléricalisme menaçant le principe d’autonomie morale [Soulié, 2015].
31. Ligue franco-italienne.
32. Sciences-Po, PAD 18.
33. Carducci G. 1881, A Victor Hugo, Bologna, Nicola Zanichelli.
34. Sciences-Po, PAD 18. Dominique Parodi extrait cette traduction de Parodi, A, Cris de la chair et de l’âme, poésies, Pari, E. dentu, 1883.
35. Parodi évoque les liens entre les deux peuples tissés par l’histoire, de la romanisation de la Gaule à l’influence révolutionnaire et napoléonienne sur l’essor des idées libérales en Italie, en passant par l’efflorescence de la littérature provençale et le rayonnement de la Renaissance italienne en France.
36. Le mot « race » à la fin du XIXe siècle prend un sens différent selon les auteurs et les contextes d’énonciation. Dans le cas de Parodi, il renvoie à une communauté culturelle et morale forgée par l’histoire et non à une identité ethnique qui serait le produit du « fatalisme de la race », du « déterminisme biologique ».
37. Parodi a contribué dans les pages de la « Revue de métaphysique et de morale », avec d’autres philosophes comme Célestin Bouglé, à la critique d’un « positivisme » de droite qui tente de mobiliser les enseignements des sciences naturelles et sociales au service la lutte contre la démocratie. Les philosophes rationalistes font notamment barrage à l’anthropo-sociologie, au darwinisme social et plus généralement de l’instrumentalisation politique des théories biologiques.
38. Sciences-Po PAD 18.
39. « L’individu et la masse dans guerre », « la guerre et la démocratie » « la guerre et le monarchisme positiviste ».
40. Parodi vise les figures tutélaires de cette droite autoritaire : Barrès et Maurras.
41. Parodi rappelle dans son article que beaucoup de « républicains très modérés et pondérés » admettaient eux-mêmes avant la guerre que la démocratie était « incompatible avec l’état de guerre ». Parmi les concessions majeures à la « thèse des anti-démocrates », il citait notamment le livre publié en 1912 par le socialiste Marcel Sembat : Faites un roi, ou faites la paix !
42. Croce (1866-1952), représentant majeur du néo-hégélianisme en Italie, est une cible majeure dans la mesure où il est considéré comme l’un des artisans d’une germanisation de la culture.
43. Ces développements répondaient peut-être également aux représentations plus nuancées de Prezzolini sur la démocratie française dans La Francia e i francesi nel secolo XX osservati da un italiano (1913). Si le livre pointait les dérives d’une démocratie immature, il mettait en garde contre la menace autoritaire incarnée par l’Action Française.
44. Deux de ses articles portent spécifiquement sur ce thème [Parodi 1916f, g].
45. Sous ce terme, Parodi renvoie moins à la doctrine ou à la mobilisation féministe, qu’au processus d’émancipation des femmes et d’intégration au monde du travail.
46. Les activités de l’Institut de Milan sont financées par le ministère. Sur l’annexe de Milan, voir Renard, 2001, chapitre VII et VIII. L’action italienne de Parodi débute au moment où Philippe Berthelot, directeur du cabinet Briand, entreprend de coordonner les différents services d’action à l’étranger en créant un organisme de propagande d’information rattaché au Ministère : la « Maison de la Presse ».
47. Il s’agit d’un organisme de propagande dirigé par des parlementaires en relation avec le Ministère des Affaires étrangères mais dont l’action est parallèle à celle des instances officielles.
48. Sciences-Po, PAD 18.
49. . « La presse italienne et la conférence de Paris » (30 mars 1916), « vers une alliance franco-italienne » (5 avril) « Pour une entente économique franco-italienne » (14 avril 1916) ou encore « L’Italie et son futur régime économique »
50. « Vers une alliance franco-italienne », Sciences-Po, PAD 18.
51. Stephen Pichon (1857-1933), ancien ministre des affaires étrangères, sénateur radical-socialiste.
52. André Tardieu (1876-1945), chroniqueur au « Temps » (rubrique politique étrangère), élu député de centre droit en 1914, membre de la Commission des Armées à la chambre des députés.
53. Albert Milhaud (1871-1955), historien et homme politique radical socialiste, nommé chef de cabinet du ministère du travail en 1914. Il sera, après la Première Guerre mondiale, le premier directeur du Service des œuvres françaises à l’étranger.
54. Lettre de Luchaire, du 17 août 1916, Sciences-Po, PAD 19.
55. La correspondance entre Luchaire et Parodi témoigne de la pression régulière exercée par le directeur de l’Institut français de Florence et sa volonté permanente de contrôler ce qui s’écrit pour éviter les écarts d’une plume trop critique qui pourraient déplaire aux autorités publiques ou nuire à la propagande.
56. Philippe Soulez pose cette question du dédoublement (de l’homo duplex) chez Bergson : Soulez, 1989, 31-35.
57. Parodi assume l’expression dans un de ses articles : Parodi 1916f, 426.